Une longue pratique de la médiation, particulièrement dans le domaine pénal, point de rencontre de toutes les contradictions et souffrances humaines, a permis de mieux répondre aux demandes et aux besoins des personnes en conflit (médiants) ; pour ce faire, à partir de l’expérience concrète de la rencontre de la confusion, du conflit voire du chaos, a été peu à peu élaborée une approche spécifique qui s’est développée à partir des sources de notre culture classique, gréco judéo-chrétienne.
Cette nouvelle conception de la médiation est le fruit d’un “travail de terrain” ; si l’on peut qualifier cette conception de philosophique, c’est en tant que recherche de l’harmonie qui peut naître de la rencontre des différences et des contradictions, au coeur de l’expérience humaine. (Heraclite, VIème s ; av JC).
La médiation est la scène sur laquelle le drame du conflit va se dérouler, car le conflit est toujours la rencontre avec une relation d’opposition et souvent avec une rupture de la relation. Or, la séparation est peut-être la plus grande souffrance vécue par l’homme dès sa naissance. La souffrance est toujours liée à une injustice vécue ou ressentie et au désordre qu’elle va provoquer. Or, le monde ne peut pas exister sans ordre, d’où le rôle de la Justice, garante du respect de l’ordre.
Mais de quel ordre s’agit-il ? D’une décision imposée pour retrouver un ordre désirable pour la société ? Ou bien d’une réponse à trouver au besoin de rétablir ce qui est juste pour les antagonistes ? Ces deux derniers points devraient être complémentaires. Ils ne le sont pas forcément dans les réponses que peut offrir la Justice mais ils restent l’objectif de la médiation humaniste.
L’expérience de médiation poursuivie et la réflexion qui lui est nécessairement liée, nous ont conduits à identifier deux axes dans la demande de justice des plaignants : l’un pratique : la nécessité du respect des normes sociales, la reconnaissance et la réparation des faits perturbateurs. l’autre éthique : la reconnaissance du besoin d’accomplissement de la personne dans sa complétude ; corps, âme et esprit. Nous touchons à une conception globale de l’individu conçu en tant qu’Un, non pas séparé entre entité sociale et politique ou morale et ontologique.
La véritable demande ne se situe pas seulement au niveau de la résolution du conflit, mais à un niveau supérieur. Elle témoigne du besoin de respect, de dignité qui peuvent rendre à la personne sa place dans la société sans exclure une possible réparation matérielle.
La médiation a ainsi retrouvé son identité dans la continuité du sens profond que la Justice s’était donné depuis les temps les plus anciens : proposer à chacun d’agir conformément à une règle pour contribuer à son propre bonheur et à celui de la cité. ( Aristote ).
La médiation est ainsi devenue pour le Cmfm un véritable projet de société qui dépasse le champ pénal de la seule résolution d’une situation conflictuelle. À ce titre, elle est éducation car elle peut rendre à l’homme le rôle qui lui appartient : celui d’être le créateur et l’acteur de son propre devenir.